Trouble de la personnalité Borderline : sentiment de vide, peur de l’abandon et symptômes dissociatifs

Semaines d’information sur la santé mentale (SISM) – Rennes – Octobre 2022

Vous pouvez retrouver le support de présentation utilisé lors de cette action ici : ABE_PPT_SISM_2022.

Introduction 

EN COURS D’ECRITURE

Méthodologie

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Résultats

Le trouble borderline 

La première thématique qui se dessine à la lecture des réponses de nos usager.e.s est, malheureusement, celle de la souffrance. La fatigue, l’angoisse et les idées suicidaires sont évoquées pour expliciter cette souffrance. Une personne nous dit que le TPB est “invivable, catastrophique et très lourd à porter au quotidien”. Une autre : “je n’arrive pas à gérer”. Plusieurs caractérisent également le trouble par la volonté et le fait de se faire du mal. 

Dans un deuxième temps, ce sont également les difficultés relationnelles qui semblent prendre une place prépondérante chez les personnes concernées par le TPB. Ces difficultés peuvent être vécues dans des cadres particuliers : professionnels par exemple. Mais bien souvent, les personnes parlent de difficultés sociales en général. Elles souffrent d’une incapacité à garder des relations, d’avoir de trop grandes attentes envers leurs proches et enfin d’éprouver déception à leur égard quand ces attentes ne sont pas remplies, entraînant ensuite un repli sur soi. Le sentiment de solitude semble très présent dans le quotidien de nos usager.e.s. La peur de l’abandon est abordée dans le cadre relationnel avec quelques variations sémantiques parfois, en parlant de peur du rejet ou d’intolérance à la solitude. Enfin la problématique des limites semble prégnante.

La troisième thématique abordée est celle de l’intensité émotionnelle, souvent qualifiée d’extrême. Plusieurs citations nous permettent de comprendre ce ressenti. Certains parlent “d’émotion puissance 1000”, “de montagnes russes émotionnelles”. Très joliment, une personne nous dit : “une symphonie d’émotions qui veulent toutes hurler plus fort que les autres”. Pour une autre, le trouble borderline, c’est avant tout “des moments trop forts qui me débordent”. 

Puis, c’est la question de l’instabilité et de l’imprévisibilité qui se pose. Les personnes nous parlent de phases, d’épisodes. D’autres parlent de changements brusques, qui font davantage penser à des crises. Un parallèle est parfois fait avec le vocabulaire du trouble bipolaire, décrivant le TPB comme “un va et vient permanent entre phases up et down”

Le vide constitue la cinquième thématique abordée. Ici il s’agit de préciser qu’il est parfois appelé “vide”, en faisant référence au huitième critère du DSM, mais d’autre fois il s’agit davantage d’un manque : “je suis constamment en manque”. A ce sujet, une personne fait le lien entre ce ressenti et sa problématique de dépendance affective qu’elle pense y être liée. De façon très imagée, une personne nous révèle voir son trouble comme “un vampire insatiable qui veut toujours plus”. 

Si ces précédentes thématiques se rapprochent des critères du DSM, [à mettre dans la discussion comme formulation], la place dans la société est un thématique originalement abordée par nos répondants. Les raisons de cette thématique sont diverses. Tout d’abord, plusieurs personnes mettent en avant que ce trouble n’est pas reconnu ce qui en fait, à leurs yeux, “un handicap invisible et non reconnu”, ce qui ajoute à la souffrance. D’autre part, il y a aussi un fort sentiment de ne jamais être à sa place, de ne pas être compris : “un sentiment de ne jamais trouver sa place dans les relations humaines : d’être soit trop, soit pas assez.”. “J’ai l’impression d’être une étrangère dans la société dans laquelle nous vivons.” 

Cette dernière citation fait le lien avec la thématique de l’identité, abordée ensuite. En effet, des problèmes identitaires sont relevés : “c’est toujours difficile d’être moi”. L’estime de soi est basse, voire catastrophique : impression de ”monstre intérieur”. 

Enfin quelques thématiques annexes sont citées comme la dissociation, la notion de danger et les comorbidités (addictions, TCA).

Vide

Nous avons par la suite demandé à nos répondants de décrire le sentiment de vide, huitième critère du trouble borderline d’après le DSM, avec leurs propres mots.

La première caractéristique abordée à ce sujet est celle de l’absence, ou de la perte. Cette absence est multiple :

  • Absence de volonté : pour une majorité de répondants, le sentiment de vide peut s’exprimer par une sensation d’être dans un mode de pilote automatique. Une personne nous dit qu’il peut également s’agir d’un immobilisme total, ou du moins, d’une très grande lenteur.
  • Absence d’intérêt, d’envie : rappelant des affects dépressifs, il s’agit également de la disparition d’un élan vital. Plusieurs personnes en témoignent : « Tout semble creux et sans saveur », « Comme si tout glissait sur moi », « ne jamais savoir ce que je veux ». L’ennui semble fortement lié à ce vécu.
  • Absence de connexions : nos répondants nous ont parlé de l’absence de connexion au monde, aux autres d’une part, mais également de l’absence de connexion à soi d’autre part : une absence d’unité de soi. C’est « comme si un plafond de verre me séparait du reste du monde et que je regardais la vie se dérouler sans que j’y prenne réellement part ». « J’ai peur que le vide détruise ma relation : de ne plus réussir à me reconnecter à l’autre. ». « Je suis totalement froide ». Dans le vide, les stimulations des proches semblent sans effet, ce qui entraîne un sentiment de solitude très profond : « comme si j’étais seul.e et que le monde tout autour était entièrement vide. » Concernant le manque de lien à soi, d’unité, il s’agit d’une anesthésie intérieure. C’est « l’impression d’être construit sur rien, sur du vide, de ne pas avoir de fondations », ou comme « être dans le flou, dans le brouillard », « comme si on m’avait arraché un bras, une partie de moi ».
  • L’absence est également celle d’avenir, de projets, de sens : « comme s’il n’y avait de sens à rien et que mon existence même n’avait aucune raison d’être ».
  • De pensées, d’émotions : il peut également s’agir d’une difficulté à réfléchir. Les émotions sont également absentes, particulièrement le plaisir, la satisfaction face à des activités habituellement satisfaisantes : c’est la perte de « la capacité à être heureuse ».
  • On nous parle également d’une sensation de manque : « comme un manque perpétuel ».

Pour résumer, nous reprendrons la citation d’un de nos répondants : « tout est en off ».

Hormis l’absence, la thématique de la mort revient également de façon prégnante. Il peut s’agir d’un néant ou d’un rien. Les descriptions de cet aspect sont nombreuses et particulièrement édifiantes : « [le] corps [est] mort à l’intérieur ». Les personnes se sentent comme « un puit sans fond à affection ». « C’est comme si j’étais un fantôme ». « Comme si j’étais plus rien ». Je suis « stoïque, comme en état de choc ». Je suis un « trou noir à l’intérieur ». C’est « un peu comme si on était en train de disparaître, comme si on était déjà à moitié un fantôme ou une enveloppe vide ». « Je déteste le sentiment de vide parce que c’est trop silencieux ».

Ses caractéristiques semblent être variables selon les participants. Pour certains, il est constant tandis que pour d’autres il est épisodique ; il s’agirait de crise aiguë de vide. Dans le cas des phases, il durerait quelques heures, se manifesterait de façon imprévisible avec une intensité variable. Selon quelques répondants, il pourrait agir comme un mécanisme de défense qui serait automatique, tel un réflexe. Celui-ci aurait pour but de fonctionner en évitant les émotions trop fortes. « Quand j’ai un moment d’émotions intenses (tristesse, colère), je comprends pourquoi inconsciemment je m’en protège par le vide le reste du temps ».

Nos répondants nous rapportent diverses situations dans lesquelles le vide peut survenir. Le moment le plus rapporté semble être celui qui suit un épisode de forte intensité émotionnelle : que ce soit de la colère, de l’angoisse ou de la tristesse, mais l’angoisse ou le stress semble être particulièrement présente pour plusieurs personnes, celle « d’être abandonnée par exemple ». « Parfois c’est quand la peur prend le dessus et que je me sens en danger imminent, comme si mon cerveau voulait se protéger pour prévenir et faire en sorte que si le danger me tombe dessus, je ne ressente rien du tout ». D’autres remarquent que le vide survient « quand je me sens incomprise » ou « quand je me sens abandonné.e / rejeté.e ».

Une personne nous partage ses hypothèses : « je pense que c’est une réaction inconsciente à des émotions trop fortes qui s’est incrustée ».

 La solitude semble être fortement liée au vide selon les dires de nos usagers. En tout cas, il serait amplifié si la solitude arrive d’un coup : « quand je rentre chez moi et que je suis seul.e ». Il survient aussi si le sentiment de solitude est présent alors que d’autres personnes sont là physiquement.

 La thématique des changements revient également plusieurs fois. En effet, le vide s’installerait suite au départ d’un proche par exemple, à une rupture : globalement après un moment avec une personne aimée.

Enfin pour certain.e.s, c’est un sentiment rencontré quotidiennement, sans forcément de raison précise : « j’ai l’impression que c’est mon état de base depuis un bout de temps ». Il pourrait être également lié à la fatigue physique.

Nous avons demandé également quelles étaient les réactions au vide que nos usagers rapportaient.

 Le tableau suivant résume ces réponses :

Stratégies de réponses au sentiment de vide

VIVRE MALGRÉ LE VIDE...… OU AVEC
Comportements auto-dommageablesRecherche de contact
Difficultés relationnellesDemande d’aide
Idées noiresOccupations
EvitementPsychoéducation
Acceptation
Expression
Animaux de compagnie

Les comportements auto-dommageables rapportés consistent en :

  • Des abus de toute sorte : nourriture, sexe, relations en général (mais « toxiques » nous précise une personne), allant jusqu’aux addictions. Une personne nous rapporte des obsessions ou idéalisations de nouvelles personnes, les comparant à une dépendance.
  • Se faire du mal : «  se couper permet de vérifier que l’enveloppe n’est pas vide ». En effet, l’automutilation permet de voir, ressentir, faire sortir « quelque chose de concret, dans le brouillard ». Elle peut également « donner l’impression d’exister ».

Les difficultés relationnelles entraînées par le vide se manifestent par une tendance au repli sur soi, à l’isolement. Une personne nous dit se sentir si froide que cela empêche les relations. Une autre nous dit que le vide entraîne des doutes dans son couple : est-ce un moment de vide ou la fin de l’amour de l’autre ? Par extension, cette personne nous dit avoir besoin de passion ou de souffrance pour pouvoir vérifier ses sentiments et répondre à cette question.

Quant à l’évitement, dans le vide il s’agirait d’un évitement de situations douloureuses et de l’attachement aux autres en particulier.

Nos usager.e.s nous rapportent cependant plusieurs techniques qu’iels peuvent utiliser en réponse au vide. 

En premier lieu, il peut s’agir de chercher le contact, que ce soit avec la famille, des amis. Les animaux de compagnie ne sont pas en reste dans cette recherche de contact non plus : « j’ai adopté un chien ce qui me force à m’occuper d’un autre être vivant et sortir ».

Plusieurs nous disent avoir le réflexe de demander une aide professionnelle : 3114, urgences… ou travailleurs sociaux et psys en tout genre peuvent être sollicités à cette occasion pour surpasser la crise de vide.

S’occuper, se distraire semble également être une technique constructive face au vide. « Il faudra que je sois occupée mentalement et physiquement durant ce moment difficile ». Pour quelqu’un d’autre, il s’agira de « me surcharger d’activités pour remplir le temps à défaut de moi ». Ces activités dépendront des personnes : « mandalas, sport, sensations fortes (parachutisme, etc.) ».

D’autres nous parlent d’acceptation, d’une forme d’apprivoisement de ce sentiment de vide : «  je vis pleinement ce sentiment de vide, j’ai appris à l’apprécier pour vivre avec », « je m’efforce de me dire que ce n’est qu’un passage et qu’à un moment le vide partira, les émotions reviendront et que je me sentirai de nouveau vivante. », « j’essaie d’apprendre à ne rien avoir à faire sans avoir envie de mourir ».

La psychoéducation semble pouvoir également aider à traverser ces moments comme nous dit une usagère : « Je lis beaucoup sur le trouble et sur ce sentiment en particulier et ça m’aide de savoir que ce n’est pas la « vie normale » parce que pendant longtemps je l’ai cru et ça donnait pas envie. » Ces lectures contribuent au sentiment d’espoir : « je garde à l’esprit que mes crises sont des crises, que ce n’est pas normal, que ça va passer (même si c’est presque impossible de comprendre pendant la crise ».

Enfin, sortir du vide peut être provoqué par l’expression des émotions bloquées nous dit un.e répondant.e : « j’utilise tous ces moyens simultanément de façon à faire sortir les émotions qui restent bloquées et qui provoquent cet état. La crise [de vide] se finit quand je pleure, que j’exprime de la colère ou que je fais une crise d’angoisse.” 

Symptômes dissociatifs 

Chez nos usager.e.s, les symptômes dissociatifs s’inscrivent sur un continuum.

  • A un niveau de dissociation plutôt faible, il y aurait une sensation de perte de contrôle, de maitrise : de soi, du monde… quelque chose qui nous échappe.
  • A un niveau supérieur de dissociation, le monde deviendrait flou avec une forte sensation d’irréalité d’un environnement qui pouvait être pourtant familier de prime abord.
  • Cette sensation peut ensuite s’étendre à son propre corps jusqu’à l’incapacité à se reconnaître dans un miroir. A l’instar du vide vient alors la perte et l’absence de sentiments, de sensations ou de douleur comme si le corps était une coquille vide.
  • A l’extrême, les répondants nous rapportent une sensation de ne plus faire partie du monde. 

Ces symptômes semblent étroitement liés à des situations de “trop”. Particulièrement, la dissociation surviendrait quand l’angoisse, ou le stress, semble être massive : “énorme”, “majeure”, “extrême”. Mais il peut également s’agir des déclencheurs suivants : 

  • Peur ou panique
  • Colère ou agacement
  • Imprévu
  • Abandon ou rupture
  • Déclencheurs émotionnels (triggers) d’un trauma

 Diverses stratégies sont rapportées par nos participant.e.s afin de faire face à ces manifestations. 

Certain.e.s ont tendance à se résigner : “attendre que ça passe”. D’autres ont développé des conduites d’évitements ou d’anticipation des situations qui pourraient favoriser ces symptômes. Il est également rapporté que l’automutilation ou la consommation de substances sont des moyens utilisés pour contrecarrer ces symptômes dissociatifs.

Il semble cependant possible pour d’autres de faire avec ces symptômes grâce à différents outils ou aides. Cela peut être des médicaments, de la méditation mais encore avoir le réflexe de contacter son ou sa psy ou d’aller aux urgences psy. La communication semble primordiale pour beaucoup de répondant.e.s : il semble utile de bien expliquer ces symptômes aux proches, voire d’instaurer des règles à appliquer dans ces situations ou de mettre en place un code non verbal pour pouvoir signifier ce qui se passe et comment y réagir au mieux. 

Peur de l’abandon 

Quant à la peur de l’abandon, symptôme bien connu et central dans le trouble de la personnalité borderline, celui-ci semble se manifester de diverses formes chez nos usager.e.s. 

Il peut effectivement s’agir de comportements de dépendance affective quand on nous dit par exemple “j’avais toujours besoin d’être voulu”.

Plus généralement, cela semble être constitué d’un ensemble de pensées, de peurs et de cauchemars : “Je pense très facilement qu’on m’en veut, qu’on me déteste, qu’on me trouve bizarre”. Ces pensées semblent envahissantes et entraînent diverses manifestations émotionnelles : larmes, colère ou anxiété. 

A l’extrême, elles peuvent également entraîner des réactions d’auto-destruction voire précipiter la fin d’une relation dans une forme d’auto-sabotage.

  •  « J’ai peur quand on met du temps à me répondre »
  • « Je sur-analyse messages et réactions »
  • « J’ai tellement peur de souffrir si jamais je me rapproche de quelqu’un parce que la personne va forcément me laisser »
  • « Je me pliais en 4 pour que mes proches n’ai rien à me reprocher »
  • « Je m’excuse beaucoup de déranger »

Nous avons demandé dans quelles situations cette peur survenait davantage et il semble alors ressortir trois domaines principaux : 

    • Constamment : pour certains, cette peur est omniprésente 
      • « Tout le temps »
      • « Toutes les situations »
      • « Avec tout le monde »
    • En réaction à ses émotions : d’autres remarquent qu’elle peut survenir en réaction à d’autres émotions 
      • “Quand je me sens seule”
      • “Quand je ne contrôle pas la situation ”
    • En réaction aux autres : cependant, cela semble être majoritairement dans le cadre des relations que cette peur survient, ce qui semble plutôt logique : 
      • « Quand il quitte mon appartement, quand il passe du temps sur son téléphone, quand il s’amuse avec d’autres personnes »
      • « Si on me dit qu’un ami sort avec un autre ami et que je ne suis pas invité »
      • « Ça pouvait démarrer de rien. D’un message qui met plusieurs minutes à arriver »

Les stratégies qui permettent d’apaiser cette peur sont variées.

Il peut s’agir de rationaliser, d’analyser, de prendre du recul : “j’essaie de trouver 5 autres raisons au comportement de la personne en face”. Pour certaines personnes, il s’agira de s’occuper, se distraire en attendant que ce sentiment devienne moins fort.

Pour d’autres, ce sera le fait de communiquer, de parler de son ressenti qui apaisera le sentiment. Certain.e.s en ont déduit l’importance pour elleux d’entretenir des relations stables et saines, ou de diversifier son cercle d’attachements : « Je me laisse m’attacher à plus de personnes pour ne pas dépendre  d’une seule ». Mais cela peut aussi entraîner l’évitement des relations, en général ou, tout du moins, l’évitement d’un attachement privilégié : « Je n’attends plus rien de personne (…) je garde certaines distances ». « J’ai décidé de ne plus avoir de relations amoureuses »

La peur de l’abandon peut également entraîner des stratégies de sur-compensation dans lesquelles la personne fournit des efforts décuplés pour éviter la perte de l’autre : « En faire des tonnes pour que les gens m’aiment et ne voient pas le monstre en moi ».

Discussion

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Résumé

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